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L’un des changements les plus évidents
dans les comics de Timely fut que l’identité de l’ennemi
changea. Alors que les héros avaient combattu les Allemands
pendant plus d’une année, ils ne s’étaient
pas frottés aux Japonais. Alors que les Américains
étaient, à un degré plus ou moins important, au
courant des actions japonaises en Chine et en Asie du sud-est, et
peuvent aussi avoir su à quel point l’embargo américain
sur le pétrole vis à vis du Japon avait exacerbé
les tensions entre les deux pays, l’attention des Etats-Unis à
l’époque était presque totalement tournée
vers l’Europe ; le Japon n’était simplement
pas considéré comme une véritable menace. Cela
se reflétait par l’identité des méchants
fictifs que les héros de Timely écrasaient ; les
Japonais ne représentaient pas un réel danger (c’était
l’idée générale du pays, et pas uniquement
celle de Timely) par rapport aux Allemands. Cependant, une fois que
Pearl Harbor eut été bombardé, cela changea. Le
premier numéro réalisé après Pearl Harbor
fut Captain America Comics # 13 (couverture datée
d’avril 1942) qui, comme cela se voit, reflète une
attitude très différente envers les Japonais. De
manière évidente, les scénaristes et
dessinateurs des comics avaient une nouvelle cible sur laquelle
lâcher leurs héros (à ce sujet, c’est,
autant que je puisse l’affirmer, le moment où l’image
des Japonais, dans les comics, devint un stéréotype
selon cette nouvelle perception ; quand les Japonais
apparaissaient auparavant, ils n’étaient pas décrit
d’une manière aussi caricaturale).
Le début de 1942 apporta son lot de changements à Timely. La mobilisation exigea son dû sur le personnel de Timely, de même qu’auprès de toutes les autres compagnies de comics. Timely perdit, entre autres, Joe Simon, Jack Kirby, Bill Everett et Carl Burgos, alors que Stan Lee se portait volontaire pour rejoindre l’armée.
Cependant, Timely ne laissa pas cela ralentir ses activités et
engagea plus de personnel et étendit sa ligne de publications.
Goodman, conscient du succès que Dell Publishing connaissait
avec leurs adaptations en comics des personnages des dessins animés
de Disney, décida d’étendre ses activités
dans le genre humoristique. Joker Comics # 1 et Comedy
Comics # 9 (le magazine avait été jusque làDaring Mystery Comics) apparurent en début d’année
(il est difficile de dire exactement quand, ce qui est
malheureusement le cas avec de nombreux comics du Golden Age ;
Joker et Comedy portaient tous les deux la date d’avril
sur leur couverture mais cela signifie simplement qu’ils furent
sur les stands entre janvier et mars). Les deux revues se révélèrent
populaires, l’humour étant un bon marché
d’expansion à l’époque. Joker Comics,
en plus d’être un comics classique de comédie,
avait un autre atout majeur : Basil Wolverton. Wolverton, un
artiste doté d’un énorme talent, avait effectué
d’autres travaux pour Timely, dont « Rockman »
pour USA Comics, mais son point fort était l’humour,
comme il allait le montrer plus tard dans Mad Magazine, entre
autres lieux. Joker Comics fut la revue où Wolverton
commença à produire des histoires humoristiques de
manière régulière (il avait fait « Disk-Eyes
the Detective » pour Circus the Comic Riot de
United Feature Syndicate au début de 1938 et avait glissé
Diks-Eyes dans un numéro de USA Comics, mais sinon
avait réalisé des strips de science-fiction comme
« Spacehawk »). Wolverton commença, dans
Joker, avec « Powerhouse Pepper » qui
allait devenir son personnage le plus populaire et son favori.
Powerhouse Pepper était un strip drôle et son humour
continue à fonctionner même de nos
jours. Wolverton inclut également, dans Joker Comics # 1, son personnage Stuporman, de Daring
Mystery ; Stuporman était une amusante satire de Superman. Dans les numéros ultérieurs de Joker,
des personnages comme Tessie the Typist et Millie the Model firent leurs débuts ; toutes les deux furent extrêmement populaires après la guerre. Et Joker, après quelques numéros, bénéficia
aussi du travail d’un autre immortel des comics : Harvey
Kurtzman. Comedy Comics commença comme un comics de
super-héros ; le numéro 9 de la série
présentait the Fin, Silver Sable de Harry Sahle, Citizen V de
Ben Thompson et Captain Daring. Mais il contenait aussi une satire
d’Hitler et de Staline, ainsi que « Splash Morgan »
de Wolverton, un strip humoristique de science-fiction. Et ce même
numéro 9 vit la première apparition de Comedy Kid, qui
allait devenir un héros récurrent de Comedy. Le
magazine se consacra rapidement et exclusivement à des
histoires humoristiques, Stuporman faisant une autre apparition, et
Kurtzman dessinant également dans ce magazine. Finalement,
Comedy Comics, dans son numéro 14 (avec une couverture
datée de mars 1943), présenta pour la première
Super Rabbit, un personnage qui allait devenir plutôt
importante pour Timely.
Timely commença par faire des comics humoristiques avec de vraies personnes, mais, au bout de quelques mois, décida de suivre la direction prise par Disney et de faire des comics humoristiques mettant en scène des animaux. En juillet, Timely commença à publier Krazy Komics, qui mettait en scène Toughy Tomcat, Silly Seal et Ziggy Pig, tous des personnages inventés par Timely ; Ziggy Pig fut réalisé par Al Jaffee, un nom qui allait plus tard devenir familier aux lecteurs de Mad Magazine. Dans le numéro 12, l’équipe entière de Timely se dessina dans une histoire ; ce n’était pas la première fois que des artistes de Timely se plaçaient eux-mêmes dans un comics. Cela avait été fait dans un des premiers numéros de Marvel Mystery, où Bill Everett et Carl Burgos étaient apparus, se disputant sur les mérites respectifs de la Torche humaine et de Namor. Et, en juin 1942, dans Marvel Mystery Comics # 34 (couverture datée d’août 1942), Everett, Burgos, Martin Goodman et les bureaux de Funnies, Incorporated apparurent dans une histoire où ils affrontèrent Hitler. Ainsi, la pratique qu’adopta Marvel au cours des années 1960, consistant à parfois placer son personnel dans les histoires, remonte à bien plus loin que cette période. Quoi qu’il en soit, Krazy Komics eut plus tard également droit à une histoire de Super Rabbit, et put aussi bénéficier de l’art de Harvey Kurtzman.
Plus tard, en octobre, Timely lança Terry-Toons Comics. Terry-Toons ne mettait pas en scène des personnages inédits : les stars du comics étaient Gandy Goose et Sour-Puss, qui avait commencé leur « carrière » en tant que personnages de dessins animés des studios d’animation de Paul Terry. C’était la première fois que Timely utilisait des personnages sous licence et cela conduisit à l’apparition de Mighty Mouse, d’abord dans Terry-Toons Comics # 38 puis, plus tard, dans son propre magazine. Plus tard encore, dans le numéro 50, Heckle et Jeckle apparurent. A la fois Krazy Komics et Terry-Toons Comics se vendirent très bien pour Timely et permirent de soutenir financièrement la société à la fin de la guerre et au-delà, quand plusieurs de leurs magazines ne se vendaient désormais plus aussi bien.
Le magazine à
gauche est, comme vous pouvez le voir, Animated
Movie-Tunes. Le magazine débuta bien plus tard, durant
l’automne de 1945 et ne dura que deux numéros.
Cependant, je l’ai inclus ici parce qu’il s’agissait
d’un comics humoristique mettant en scène des animaux et
présentant Super Rabbit, Ziggy Pig et Silly Seal ; comme
j’évoque les comics humoristiques d’animaux de
Timely ici, et parce que c’est la seule image acceptable que
j’ai pu trouver et scannériser qui représente
Super Rabbit. Super Rabbit est l’une des ombres du Golden Age
de Timely qui est presque complètement oublié
aujourd’hui, mais, à cette époque, il était
presque aussi importante pour Timely que Captain América. Il
n’était pas le premier « super-lapin »
dans les comics de super-héros ; cet honneur revient à
Hoppy the Marvel Bunny de Fawcett, qui fit ses débuts dans
Funny Animals # 1 (couverture datée de décembre
1942). Et Super Rabbit ne fut jamais aussi important que Hoppy. Mais
Super Rabbit apparut dans la plupart des comics d’animaux
humoristiques de Timely, était la planche de salut de cette
ligne, et il avait son propre magazine, portant son nom, qui dura de
l’automne 1944 à novembre 1948, durant plus longtemps
que plusieurs des comics de super-héros de Timely. Super
Rabbit, comme le reste la ligne des animaux humoristiques de Timely,
languit dans une obscurité imméritée
aujourd’hui, mais il était fait avec talent et charme,
et mérite mieux.
Avec le départ de Stan Lee, il fallait un nouvel éditeur et Vince Fargo fut choisi. Sa force était les comics d’animaux humoristiques et c’est le genre de comics le plus populaire à l’époque ; avec Stan Lee, il avait effectué divers travaux sur des personnages comme Silly Seal et Ziggy Pig, et il avait de l’expérience avec Popeye et Betty Bood aux studios de Mar Fleischer. Timely adopta un nouveau logo durant cette époque – un bouclier rouge, blanc et bleu, conçu pour refléter le patriotisme que tout le monde ressentait à cette époque. Ce bouclier est ce qui est représenté sur l'index de cette chronologie.
En août, Mystic Comics fut arrêtée, probablement à cause des ventes insuffisantes. Bien que le personnage the Destroyer fut populaire, le changement régulier de la distribution de Mystic et une qualité hautement variable n’a certainement pas aidé le magazine. Mystic avait en fait déjà été arrêté auparavant ; le numéro 5, couverture datée de mars 1941, avait été le dernier numéro de la première série et avait été rempli d’histoires puisées dans le réserver de Funnies, Incorporated. Mystic avait repris sept mois plus tard avec le numéro 6 (couverture datée d’octobre 1941), avec quelques nouveaux personnages : le Challenger, le Destroyer, le Witness et Daveu & the Demon, parmi d’autres (the Black Marvel et the Blazing Skull étaient deux personnages qui survécurent à l’arrêt). The Destroyer, qui apparut également presque simultanément dans All-Winners # 2 (couverture datée de l’ « automne 1941 ») devint le héros de seconde zone le plus populaire de Timely, mais sa popularité n’était pas suffisante pour permettre à Mystic de survivre.
A la fin de 1942, Timely lança Miss
Fury. Le personnage de Miss Fury fut réalisé par
Tarpe Mills, l’une des rares artistes féminines du
Golden Age. Elle avait commencé à faire un comics strip
pour un journal du dimanche appelé « Black Fury »,
qui fut l’une des premières adversaires féminines
du crime à apparaître dans un journal. Le strip se
révéla très populaire durant la guerre, avec le
personnage changeant de nom pour devenir « Miss Fury »,
et s’attaquant aux saboteurs et aux ennemis du pays, dans une
grand variété de lieux, y compris le Panama et les îles
du Pacifique. Miss Fury de Timely fut une collection de
rééditions des comics strip du journal.
Peu après cela, Timely sortit Kid Komics # 1 (couverture datée de février 1943). Comme Young
Allies, le comics visait le marché des enfants et Timely
semble clairement avoir fait un grand effort pour faire de Kid
Komics une réplique du succès de Young Allies.
Le premier numéro mettait en scène Knuckles &
Whitewash Jones, de Young Allies ; il profitait également
de l’art de Basil Wolverton. De plus, le numéro 1
présentait Captain Wonder et son coéquipier Tom (c’est
Captain Wonder sur la couverture à
gauche) ; Captain Wonder et Tim inhalent les fumées
d’un merveilleux médicament qui leur donne la force de
douze hommes et, du coup (naturellement) ils partent combattre le
crime. Captain Wonder et Tim était des succédanés
assez évidentes de Captain América et Bucky, mais fait
avec l’art de Syd Shores, plutôt que celui de Jack Kirby
(un recul évident) et sans la vitalité qui faisait de
Captain América un best-seller. Le numéro 1
introduisait également Subbie, le coéquipier de Namor.
A cette époque, Namor était essentiellement un héros,
même s’il demeurait grincheux ; ses aspects rugueux
avaient été adoucis et le tempérament anti-homme
de la surface qui avait initialement fait de lui un méchant
avait, pour l’essentiel, disparu. Ce qui explique que Timely
ait eut le sentiment qu’il était désormais
possible de lui donner un coéquipier. Le numéro 2 de
Kid Komics vit l’arrivée des Young Allies –
Bucky, Toro et Subby – et, ainsi, Timely espérait sans
aucun doute que le rajout de Subby à l’équipe, et
la présence de Captain Wonder et Tim, et la couverture d’Alex
Schomburg (il dessina les couvertures des numéros 2 à 4
et 6 à 10) donneraient à Kid Komics l’image
de cumuler le meilleur de Young Allies et Captain America
Comics. Cela ne marcha pas, les ventes du magazine furent ternes
et Captain Wonder et Tim furent abandonnés dès le
deuxième numéro. Kid Komics perdura pendant
quelques numéros de plus, et fut finalement arrêté
avec le numéro 10, au début du printemps 1946 ;
l’introduction d’un nouveau groupe de jeunes (the
Daredevils) et de nouveaux héros adolescents (Red Hawk, Tommy
Tyne) et l’insertion de super-héros confirmés (la
Vision, the Destroyer et the Whizzer) n’aidèrent pas à
relever les ventes du magazine.